Réforme LPP 21: transformer l'essai

Réforme LPP 21: transformer l'essai

15 juin 2021, Bleu Horizon
Bleu Horizon #17-Juin 2021 | Réforme LPP 21 ― © DR

 

Réforme LPP 21 : transformer l’essai

 

[HORIZON] Depuis dix ans, les discussions se succèdent dans le but d’aboutir à une réforme des 1er et 2e piliers acceptable pour le peuple suisse. Après l’échec de la votation « Prévoyance Vieillesse 2020 » en septembre 2017, le Conseil fédéral a découpé le projet de réforme en deux : AVS 21 et LPP 21. Tandis que le projet AVS 21 suit son propre cheminement, fin 2020, l’exécutif transmet au Parlement le projet LPP 21 dont le contenu repose sur une solution proposée par les partenaires sociaux. Cette nouvelle tentative de réforme va-t-elle aboutir ? Le contexte de la crise sanitaire va-t-il jouer un rôle ? Une seule certitude : des réformes s’imposent. Explications.

 

Il faut se rappeler que le 24 septembre 2017, les Suisses ont dit non à la réforme « Prévoyance Vieillesse 2020 » (52,7 % de non) qui leur avait été proposée. Il s’agissait d’une proposition de réforme globale qui regroupait les deux piliers : l’AVS et la LPP. L’analyse de la votation a révélé qu’une des causes du refus par le peuple était la complexité du projet liée au regroupement des deux piliers. Le Conseil fédéral a décidé de réduire le spectre de la réforme en la découpant en deux, l’une dédiée à la réforme du 1er pilier, appelée AVS 21, et l’autre dédiée à la prévoyance professionnelle, le 2e pilier, appelée LPP 21. Par ailleurs, les objectifs suivants ont été jugés nécessaires dans le cadre de la réforme : garantir les rentes, renforcer le financement et améliorer la couverture des personnes avec des bas salaires ou travaillant à temps partiel. Les organisations faîtières nationales des partenaires sociaux ont été invitées à formuler une proposition d’adaptation de la LPP. L’Union patronale suisse (UPS), Travail.Suisse et l’Union syndicale suisse (USS) ont abouti et formulé une proposition, celle du compromis appelée « partenaires sociaux ». De son côté, l’Union suisse des arts et métiers (USAM) a également présenté une solution. Plusieurs autres organisations ont aussi formulé des alternatives. En novembre 2020, le Conseil fédéral a annoncé vouloir s’appuyer sur le projet des partenaires sociaux pour la réforme de la LPP 21 et l’a ainsi transmis au Parlement. Le Conseil fédéral a estimé que les propositions alternatives ne remplissaient pas l’un des principaux objectifs de la réforme : la garantie du niveau des rentes. Depuis février dernier, les débats ont démarré au Parlement et notamment au Conseil national qui, à l’unanimité, a confirmé la nécessité d’une réforme.

 

Le pourquoi de la réforme

Selon plusieurs analyses internationales, le système de prévoyance de la Suisse fait partie des meilleurs systèmes au monde et le but de cette réforme est justement de le pérenniser. Toutefois, aujourd’hui, certains paramètres (comme le taux de conversion) ne sont plus conformes aux réalités et nécessitent d’être adaptés.

Rappelons que l’augmentation de l’espérance de vie, dont il faut se réjouir, entraîne des déséquilibres financiers en raison du versement des prestations pendant une durée plus longue. Il faut dire aussi que la stabilité financière de la LPP, système de capitalisation, est liée à l’évolution des marchés financiers et dans le contexte des taux d’intérêt bas, la tendance est à la baisse. Enfin, il convient d’intégrer les évolutions sociétales, la diversité des parcours et d’améliorer la couverture des travailleurs à temps partiel, en particulier celle des femmes et celle des bas salaires.

 

Le contenu de la réforme

Le compromis porte sur les points suivants :

• Réduire le taux de conversion des rentes à 6 %, aujourd’hui à 6,8 % dans le but de pérenniser les rentes sur le long terme (voir Bleu Horizon #05 mars 2018, Comprendre le taux de conversion en six questions).

• Réduire de moitié la déduction de coordination. Aujourd’hui, la déduction se monte à 7/8 de la rente maximale AVS, soit CHF 25 095.–. Elle sera portée à CHF 12 548.– permettant ainsi d’augmenter le salaire assuré et d’améliorer dans le même temps la couverture des bas salaires.

• Rééchelonner les bonifications de vieillesse. Les bonifications de vieillesse sont financées par l’employeur et l’employé. Aujourd’hui, elles sont appliquées selon l’âge de l’assuré. Il existe quatre niveaux. La réforme en prévoit seulement deux, soit 9 % pour les personnes âgées entre 25 et 44 ans et 14 % pour les personnes de plus de 45 ans. L’objectif est de mieux répartir le financement de l’épargne au cours des quarante ans de cotisation et de supprimer le surcoût existant pour les personnes de 55 ans et plus.

• Mesures de compensation. À noter que durant la phase de transition (15 premières cohortes après l’entrée en vigueur de la réforme), des compensations financières sous la forme d’un supplément de rente (allant de CHF 200.– à CHF 100.– par mois à vie) seront prévues pour atténuer les baisses de rente. Le financement sera assuré par une cotisation de 0,5 %, prélevée sur les salaires AVS.

Les deux projets de réforme sont maintenant au cœur de la mêlée parlementaire.

 

Lire aussi :

- Cet article a été publié dans Bleu Horizon #17 - juin 2021

 

 

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